Les grandes plaines du Texas fascinent, tout autant que les red rocks du Wild Wild West. D’ailleurs, le Texas… c’est déjà un peu l’ouest, n’est-il pas ? Ces grands espaces désertiques dégagent il est vrai une certaine poésie, un magnétisme indéniable. Paradoxalement, en terme de destination de voyage, le Texas reste encore assez peu couru par les touristes européens. Mais nous avons déjà quelques afficionados sur Sunset.
Pour vous donner envie, nous vous proposons aujourd’hui une liste parfaitement subjective (et incomplète bien évidemment), de films ayant au moins deux points en commun : ils ont tous été tournés au Texas et sont accessoirement de bons films ; pour certains il s’agit même de chef d’œuvres… (Sunset ne vous conseillera jamais de gros navets, soyez-en certains !).
Voici donc de quoi occuper quelques longues soirées d’hiver et, pourquoi pas, peut-être vous donner envie de visiter l’emblématique Lone Star State.
Peut-être avez-vous déjà vu certains d’entre eux et que vous les avez appréciés (ou pas, vous avez le droit !), donc n’hésitez pas à nous donner votre ressenti.
Boyhood (2014)
Un film complètement atypique et très novateur dans la forme.
12 années durant, le réalisateur Richard Linklater a réuni par intermittence la même troupe de comédiens afin de filmer l’histoire et le quotidien d’une famille du Texas et de suivre la vie du jeune Mason, 12 ans (Ellar Coltrane qui n’avait que 8 ans au début du tournage), jusqu’à sa vie d’adulte. Ses parents sont interprétés par Ethan Hawk et Patricia Arquette.
Boyhood commence à Houston, mais vous y verrez aussi notamment Austin, la ville fantôme de Terlingua, le parc national de Big Bend… quelques noms qui devraient titiller votre curiosité.
Le film, présenté pour la première fois en 2014 au Festival de Sundance, a reçu de nombreux prix par la suite, dont l’Ours d’Argent au Festival International de Berlin en 2014 et le Golden Globe du meilleur film dramatique en 2015.
The Tree of Life (2011)
Un film de Terrence Malick ne laisse personne indifférent. The Tree of Life (sous-titré en France L’Arbre de Vie) ne présente pas une histoire véritablement linéaire, il s’agit plutôt d’un regard posé sur l’humanité, sur l’essence de l’Homme, sa naissance et le travail de deuil. Plus largement, le film est une magnifique épopée philosophique et cosmique. Attendez-vous à ressortir du film un peu sonné, avec plus de questions que de réponses (courant chez Malick…). The Tree of Life on l’adore… ou on le conspue, vous voilà prévenu !
Hormis de nombreux détours par différents sites naturels de l’ouest américain, étapes d’un merveilleux voyage initiatique (Death Valley, Antelope Canyon, Goblin Valley, Bonneville Salt Flats…), le film traverse également le Texas, les villes de Austin, Houston, Dallas ainsi que de nombreuses bourgades moins connues du sud du Texas et le baie de Galveston. Vous passerez aussi par la tristement célèbre ville de Waco, aujourd’hui renommée pour deux musées principalement : celui des Texas Rangers (tout un programme !) et celui du Dr Pepper (Yummy !).
There will be blood (2007)
Réalisé par Paul Thomas Anderson (Inherent vice, The Master, Magnolia, Punch Drunk Love…) et inspiré du roman Pétrole ! (Oil !) de Upton Sainclair, There will be blood est une fresque historique sur la découverte du pétrole en Californie vue à travers la vie d’un prospecteur, Daniel Plainview, incroyablement interprété par Daniel Day Lewis (Daniel Day Lewis est TOUJOURS incroyable). Le film est captivant, fascinant, et descend jusque dans les tréfonds de l’âme humaine. Une véritable apothéose !
Même s’il s’agit ici de l’histoire de la Californie, le film a été en partie tourné… au Texas (vous aviez deviné ? c’est bien, vous suivez !) et notamment dans la région de Marfa, un secteur incontournable. Si vous n’êtes pas allés à Marfa, vous ne pouvez pas prétendre connaître le Texas, le Texas profond… Le paysage est rude et le voyage est long mais la récompense est à la hauteur de l’effort.
Trois enterrements (The Three Burials of Melquiades Estrada, 2005)
On retrouve un jour le corps de Melquiades Estrada, vaquero, enterré en plein cœur du désert. Qui l’a tué et pourquoi ?
Le film, contemporain, emprunte largement aux codes du western, pour notre plus grand bonheur. Le résultat est fort, aride et d’une dignité infinie, tout à l’image du désert dépeint avec majestuosité par le réalisateur Tommy Lee Jones. C’est lent, ça saisit aux tripes, c’est noble et engagé. Les paysages grandioses et sublimement mis en lumière sont ceux du parc national de Big Bend et de la région du mythique Rio Grande (Lajitas, Redford, Shafter…). Nettement plus au nord, dans les larges plaines souvent ingrates, vous verrez aussi Odessa et Van Horn. Un film puissant et non consensuel.
Lone Star (1996)
Un film signé John Sayles avec notamment Kris Kristofferson et Matthew McConaughey.
Cette histoire policière suit les investigations d’un shérif d’une petite bourgade de la frontière mexicaine sur leur meurtre d’un autre shérif disparu 30 ans plus tôt et dont on vient de découvrir le corps. Le titre du film fait référence à l’étoile portée par les forces de l’ordre mais aussi et surtout au symbole du Texas, le Lone Star State, et à son drapeau. Lone Star est l’occasion de dresser, à travers l’enquête, l’histoire de la région et des communautés qui l’habitent. Le film a été entièrement tourné dans le secteur du Rio Grande, à Del Rio, Eagle Pass et à Laredo. A (re)découvrir urgemment !
Gilbert Grape (1993)
Un film réaliste et émouvant sur la vie de gens simples et attachants. Suite à la mort de son père, Gilbert (impeccable Johnny Depp) devient le chef de famille et doit à la fois s’occuper de son frère Arnie handicapé (incroyable Leonardo DiCaprio), de sa mère Bonnie atteinte d’obésité morbide depuis le suicide de son époux, et de ses deux jeunes sœurs Amy & Ellen.
Inspiré du roman What’s Eating Gilbert Grape de Peter Hedges (1993) et réalisé par Lasse Hallström (Terre Neuve, L’œuvre de Dieu, la part du diable…), le film est sensé se passer en Iowa mais a été 100% tourné aux Texas, à Austin et dans diverses petites villes alentours : Lockhart, Manor, Pflugerville, Georgetown (épicerie où travaille Gilbert), ainsi que Denton nettement plus au nord près de Dallas.
Hot Spot (The Hot Spot, 1990)
En 1990, Dennis Hopper signe un fascinant et torride thriller sentant bon la moiteur des petites bourgades du sud des États-Unis. L’indémodable Don Johnson y campe un séducteur hors-la-loi, ambigu mais non moins infiniment sympathique. Le film ne manque en outre pas d’humour, parfois acide. Femmes fatales (troublante Jennifer Connelly et exubérante Virginia Madsen), manipulations, sensualité, ironie, musique blues… tous les ingrédients sont là pour vous tenir en haleine jusqu’à la fin… qui est à la hauteur de nos espérances. Vous pourrez au choix, selon votre sensibilité, rire de bon cœur ou pleurer devant tant de malchance (le destin tient à si peu de choses !). Une véritable curiosité qui ne demande qu’à être redécouverte.
Hot Spot a été entièrement tourné au Texas, principalement dans les environs de Austin, à Taylor et à Luling. Le paysage désertique semi-urbain, ses couleurs et sa chaude lumière estivale sont d’ailleurs les personnages principaux de cette déroutante histoire qui ne pouvait se dérouler que dans le sud du Texas et nulle part ailleurs !
Sang pour sang (Blood Simple, 1984)
Premier film des frères Cohen, Sang pour sang regroupe déjà tout ce qui fera leur succès dans les décennies à venir : humour noir et cynisme, violence, atmosphère malsaine et inquiétante, scénario pervers et loufoque…
Ce polar glauque transpire le Texas profond et n’est pas tendre avec ses habitants, loin de là !
Les scènes de bar ont toutes été tournées à Pflugerville (à prononcer vite vite vite en mastiquant un chewing-gum à la cannelle) au nord de Austin ; les autres scènes ont été filmées à une douzaine de miles tout au plus, à Hutto et Round Rock.
Paris Texas (1984)
Le voyage initiatique et la quête d’un homme (subjuguant Harry Dean Stanton), disparu durant quatre longues années, et de son jeune fils à la recherche de Jane, la mère de l’enfant… un road trip à travers tout le Texas, d’une élégance folle et d’une poésie à fleur de peau. Wim Wenders signe là un film inoubliable.
La bande originale signée de Ry Cooder, à la guitare, suit les protagonistes sur le route, magnifiant les paysages désertiques uniques, une musique paisible, troublante et évocatrice qui fait du bien à l’âme… et qui donne furieusement envie de repartir sur la route…
Les Saisons du cœur (Places in the Heart, 1984)
Le Texas durant la Grande Dépression… Edna Spalding (superbe Sally Filed qui obtînt l’Oscar de la meilleure actrice pour ce rôle – le film avait été nommé 7 fois), jeune veuve, fera tout pour sauver sa famille et ses plantations de coton. Elle recevra l’aide de son métayer noir (impeccable Danny Glover) et d’un certain Mr Will, un employé aveugle (premier rôle au cinéma de John Malkovich).
Avec Les Saisons de cœur, le cinéaste Robert Benton souhaitait rendre hommage aux vertus traditionnelles de l’Amérique profonde. Il réalise un film largement autobiographique, intégralement tourné dans son village natal, à Waxahachie à une trentaine de miles au sud de Dallas (reconnu aujourd’hui pour son formidable héritage architectural historique, notamment victorien). Le personnage de Mr Will est en outre inspiré de son grand-oncle (un vendeur de balais !).
Sugarland Express (The Sugarland Express, 1974)
Un film inspiré d’un fait divers réel survenu dans les années 1960.
Lou est une jeune femme marginale, excentrique et naïve (adorable Goldie Hawn)… mais bien décidée à reconstruire sa famille, coûte que coûte ! Elle s’arrange pour faire évader son mari de prison et tous deux partent alors en direction de Sugarland où leur tout jeune fils a été placé en famille d’accueil. Sur la route, des circonstances abracadabrantes feront qu’ils seront obligés de prendre un policier en otage. Les évènements vont ensuite se précipiter, les forces de l’ordre les prendront en chasse à travers tout le Texas, suivis par une horde de journalistes et soutenus par les populations locales. Une histoire assez simple mais complètement démente, qui ne manquera ni de piment ni d’humour, mais qui laissera un arrière goût bien amer et qui dévoilera une envergure insoupçonnée, que ce soit cinématographique ou sociale.
Sugarland Express est une course effrénée au cœur d’une Amérique profonde en quête de réponses et de changement, un film plein de tendresse, attachant et absurde…. Les paysages du Texas défilent à vive allure sous la caméra de Steven Spielberg, d’une fluidité inouïe, et accompagnés de la sympathique musique de John Williams (toute première collaboration de l’incontournable duo Spielberg/Williams).
Bonnie & Clyde (1967)
Autre époque, autre course poursuite… celle des amants criminels, Bonnie Parker et Clyde Barrow (formidables Faye Dunaway et Warren Beatty), qui durant la Grande Dépression, sillonneront tout le pays ainsi que les banques de toutes les petites bourgades de l’Amérique profonde ! Admirés, conspués, poursuivis par toutes les polices locales, ils devront faire face à leur destin.
Si de nombreuses scènes ont été filmées en studios, le film a été tourné en très large partie en extérieur et plus précisément au Texas. Vous y verrez les banques de Pilot Point, Red Oak, Trinity River (baie de Galveston) ou encore Venus, ainsi qu’une multitude de petites villes autour de Dallas dont Waxahachie (dont on parle plus haut), Maypearl, Ponder, Midlothian, Lemmon Lake, Rowlett, Garland…
Le Plus sauvage d’entre tous (Hud, 1963)
Ce film « post-western » signé Martin Ritt (à qui l’on doit également le troublant et sombre Hombre) est inspiré d’un roman de Larry McMurtry, Horseman, Pass By (1961). Tout à la fois mélancolique, dur et sublime, il raconte un conflit familial et l’adieu à un certain mode de vie et à des valeurs d’un autre temps. Le milieu et la vie agricole texans y sont largement décrits, ainsi que le choc des générations, les difficultés d’adaptation d’une famille d’éleveurs et les mutations économiques radicales des années 1960.
Le très charismatique Paul Newman y interprète le personnage de Hud, rancher de tradition, un anti-héros, rebelle et impulsif, mal dans sa peau, il crève littéralement l’écran. La photographie noir et blanc de James Wong Howe (pour laquelle il reçut un Oscar) est de toute beauté et la musique d’Elmer Bernstein, juste quelques accords de guitare poignants, d’une sublime simplicité. Déchirant.
Le film a été entièrement tourné au Texas, notamment dans la région de Claude et tout au nord, dans le Texas Panhandle, sorte d’enclave à l’intérieur de l’état, encerclé par le Nouveau-Mexique et l’Oklahoma. Il avait été dit à l’époque de la sortie de Hud qu’aucun autre film n’était parvenu à rendre si vivantes la poussière et la sueur du Texas.
Alamo (The Alamo, 1960)
1836, 185 texans insoumis résistent à l’armée mexicaine et au Général Antonio López de Santa Anna dans l’ancienne mission espagnole de San Antonio de Valero transformée en fort, le célèbre Fort Alamo. Le siège dura 13 jours et les défenseurs texans furent tous massacrés. Le siège de Fort Alamo fut un évènement majeur de la révolution texane et encouragea de nombreux civils à rejoindre l’armée.
Ce tragique évènement historique a été raconté et largement popularisé dans la série télévisée Davy Crokett des années 1950 ainsi que dans le film de John Wayne de 1960. Si le film prend de nombreuses libertés par rapport à la réalité historique, il n’en demeure pas moins une œuvre majeure dans l’histoire du western grâce au charisme des acteurs, au déluge de moyens techniques et à l’ampleur de la reconstitution.
Alamo a été entièrement tourné au Texas, à Brackettville, un studio de cinéma situé à proximité de San Antonio. Le studio est resté en activité jusqu’en 2009, le site était d’ailleurs ouvert au public. Alamo Village a fermé ses portes après le décès du propriétaire.
Géant (Giant, 1956)
Finissons par le film le plus emblématique de l’état du Texas… Géant de George Stevens !
Géant est une gigantesque et brillante fresque historique et épique, de la vie des ranchers du milieu des années 1920 jusqu’à l’émergence d’une nouvelle économie, celle du pétrole, dans les années 1950. Chacun des personnages représente d’une certaine façon une part de l’histoire du Texas. La délicieuse, jeune et engagée Leslie Benedict (extraordinaire Elizabeth Taylor) aux idées progressistes luttera pour le droit des femmes et contre les discriminations envers les mexicains. Bick (troublant Rock Hudson), son mari, est l’archétype du propriétaire terrien et l’héritier de valeurs issues du siècle précédent. Les époux apprendront à se connaître, à s’aimer et grandiront ensemble, au cœur de ce Texas lui aussi en pleine évolution, tout à l’image du personnage de Jett (grandiose James Dean) qui figurera à lui seul toutes les mutations économiques des années 1950 et l’Empire du pétrole. Géant va bien au delà de le simple épopée familiale et nous raconte le Texas tel qu’il a été et tel qu’il sera… l’ultime plan du film, d’une force prodigieuse, résume avec beaucoup d’émotions l’avenir du Texas ou en tout cas ce qu’il devrait être. Nous sommes en 2015 et près de 60 ans après sa sortie, Géant n’aura jamais été autant d’actualité.
Le film a été tourné dans la région de Marfa (ranch de Reata) et à Valentine (site du village mexicain).
Il reste encore aujourd’hui d’infimes vestiges de la splendide demeure des Benedict. Si vous empruntez l’Highway 90, scrutez les horizons poussiéreux, vous y verrez peut-être quelques ruines de Reata…