23 février : ou "comment nous avons failli être dévorées vives par un bison assoiffé de sang"
la journée commence par un nouveau petit déjeuner copieux, aujourd'hui, omelette garnie :
Nous avons réservé un "drop off" par les "petits" taxis jaunes du parc. Notre guide nous autorise à mettre les skis à l'intérieur car nous serons les seules aujourd'hui
Elle vérifie avant de nous laisser monter que nous avons bien deux paires de gants chacune, de la nourriture, de l'eau et que nous avons prévenu le bureau du lobby (il faudra d'ailleurs les avertir de notre retour dès que possible, sinon ils vont lancer des recherches!)
En discutant un peu de la pluie et du beau temps, elle nous fait part de sa satisfaction que les températures clémentes soient revenues

car cet hiver a été particulièrement froid : elle s'en rend compte parce qu'elle a enfin toute la peau sur ses doigts, quand il a fait si froid, il lui est souvent arrivé que sa peau reste collée aux poignées des portes quand elle oubliait de mettre ses gants
Elle nous informe que la balade sera écourtée car une avalanche rend le début de la piste Divide impraticable, c'est peut-être pas si grave ! On se contentera de Lone Star Geyser et des Kepler Cascades.
Avant de nous abandonner, elle vérifie que nous avons bien mis nos skis et que nous savons en faire ! Super consciencieuse !
La piste est très agréable, dans les bois, on longe la Firehole River sur chacune de ses deux rives, la trace est bien faite, ça glisse bien, on est seules au monde, jusqu'à ce que ...

(musique des Dents de la mer)
au détour d'un virage, une énorme masse sombre s'avance vers nous ! Notre cerveau pré-conditionné par les nombreux avertissements des panneaux omniprésents, a mis plusieurs secondes à réaliser que ce n'était pas un grizzly, mais un bison !
Premier soulagement vite oublié avant le retour de la panique : il nous coupe la route ! Il occupe toute la largeur de la piste ! Faire demi-tour ? oui, mais il court plus vite que nous ne skions, l'entrée de la piste est très loin derrière nous ! La distance de sécurité des 25 yards préconisée par les Rangers se réduit de façon alarmante, il va trop vite ...
Sans se consulter, on plonge chacune sur notre côté de la piste dans la poudreuse du sous-bois, mais elle fait bien un mètre et nous sommes donc immobilisées, les skis plantés, on ne peut se redresser qu'en s’agrippant tant bien que mal aux branches basses des sapins sur lesquels on venait de manquer de peu de s'empaler...
Les appareils photos sont noyés et seront HS pour la journée ...
Moi je ferme les yeux, dans un réflexe de survie débile (si je ne le vois pas, il ne me voit pas ?), mais ma sœur, plus courageuse le surveille, du coin de l’œil, vaut mieux pas qu'il se sente agressé s'il croise son regard !
Cet imbécile s'arrête à notre hauteur, respire très très fort (essaie-t-il de renifler pour savoir si on est comestibles ?) - ces quelques secondes nous paraissent des heures interminables

- puis il reprend sa route et nous laisse derrière lui.
Gros soupirs de soulagement, pêche aux appareils photos, extirpation laborieuse des skis et de nous-mêmes du sous-bois, puis congratulations d'avoir échappé au monstre, du moins le croyions-nous ...
La suite de la promenade est moins sereine, on se retourne souvent et on a l'oreille aux aguets
Voici une photo rescapée de Lone Star Geyser, on voit bien que tout le côté droit est bien humide et donc flou...
Après ça, on s'octroie une petite pause goûter pour se remettre de nos émotions. Les BN fraise que nous avons emportés n'ont pas la consistance chewing-gum habituelle que tous les amateurs de BN connaissent, ils sont tellement gelés qu'ils cassent comme du verre

, puis retour par la même piste en surveillant les traces de bison et leur orientation, au cas où il aurait fait demi-tour et nous guetterait derrière un sapin! Les appareils ne sont pas encore secs !
Petite halte au point de vue sur les Kepler cascades, appareil toujours mouillé :
On a posé les skis, par prudence, car la neige accumulée est plus haute que les barrières de sécurité !
La suite de la piste s'effectue sur la route où nous retrouvons la civilisation sous la forme de quelques snowmobiles, mais aussi ...
Notre pote le grizzly/bison ! On le reconnaît à son petit œil mauvais ! Il est immobile, au milieu de la route, entre deux groupes de snowmobiles arrêtées (la loi les oblige à stopper sur le bord de la route quand ils croisent un animal sauvage et à attendre qu'il passe) et nous sommes derrière eux ! Au bout de quinze minutes d'immobilité, on commence à sentir le froid s'insinuer !
Heureusement un conducteur de Snowcoach vient débloquer la situation : il nous propose de nous mettre à sa droite et d'avancer en même temps que lui pendant qu'il croise le bison à sa gauche, il n'est pas particulièrement rassurant quand il ajoute "You should be safe!" Nous passons en serrant les fesses et arrivons bientôt dans la zone de confort "bison free" : ouf ! sauvées !
Nous retournons jusqu'à Old Faithful et notre cabine, glacées, affamées, mais saines et sauves ! et pas peu fières d'avoir vaincu la wild life déchaînée !
