J-5 Mercredi 7 Septembre 2011 : Mais où est la bonne porte ?
Après un breakfast au buffet de notre
hôtel, que nous voulons copieux (on profite allègrement des muffins, gaufres, fruits, céréales…), nous quittons la chambre aux alentours de 7 h 30. Nous faisons un rapide petit tour du pâté de maisons à pieds.
La ville de Sheridan semble redécouvrir son histoire. Le Sheridan Inn, un beau bâtiment historique où séjournait régulièrement Buffalo Bill, est en pleine rénovation.
Sheridan Inn et ses jardiniers (restaurant ouvert, hôtel toujours en rénovation)
The Dance (James Muir)
Il est encore tôt et les rues sont désertes.
Aujourd'hui, nous avons décidé de faire un gros détour par le Montana afin d'aller voir le champ de la bataille de Little Bighorn, où s'est déroulée en Juin 1876 la Custer's Last Stand (ultime résistance de Custer) qui marqua la victoire écrasante du célèbre Crazy Horse lors de la grande guerre Sioux (ou Guerre des Black Hills). Les lieux sont désormais un monument national hautement protégé.
Après environ une heure de route, nous faisons un premier arrêt à Garryowen (ville qui doit son nom au vieil air irlandais que chantait à tue-tête le 7ème de cavalerie de Custer) afin de visiter le
Custer Battefield Museum (entrée 5 $ par personne, gratuit jusqu'à 12 ans, photos interdites, comptez une petite heure de visite, voir plus si vous lisez absolument tout !). Ce musée se révèle passionnant une fois de plus On y découvre une petite collection d'objets liés à Custer (quelques pièces représentant à ce jour la plus grande collection du pays accessible au grand public), une galerie de photos historiques, des pièces de vie quotidienne et d'artisanat indien.
A noter qu'en 1926, lors de la construction de la route 87, on a découvert sur place les restes d'un soldat de cavalerie aujourd'hui enterré dans la tombe du soldat inconnu devant le musée, unique soldat à reposer en dehors d'un cimetière national dans tout le pays.
Peu avant 10 h 00, nous arrivons sur le champ de bataille de Little Bighorn (pass America the Beautiful accepté).
Se retrouver sur les lieux d'un tel désastre fait un drôle d'effet (il faut vous dire aussi que c'est la première fois que je pénètre sur ce type de sites) et permet d'avoir une meilleure compréhension des différents mouvements et de la suite des évènements.
Je ne vais pas vous faire la description heure par heure du déroulement de la bataille. Mais pour résumer très brièvement : le Colonel Custer et 267 de ses hommes périrent en ce jour du 25 Juin 1876. Reste que si les Sioux sont ressortis vainqueurs, ils ont subi eux aussi de très lourdes pertes humaines et on ignore encore aujourd'hui combien d'hommes ont péri, probablement un tiers de leurs 1500 guerriers.
Quant au désastre de Custer, il apparaît aujourd'hui difficile de nier la responsabilité (même si le sujet reste sensible et controversé) des capitaines Benteen et Reno qui auraient refusé de porter assistance à Custer, ce dernier leur ayant ordonné de venir le rejoindre avec des munitions alors qu'ils se trouvaient derrière une colline à moins de 10 km. Ils choisiront de battre en retraite devant l'offensive indienne. Abandon délibéré et trahison envers Custer ? Ou bien totale impossibilité de leur part de venir en aide à Custer et ses hommes ?
Pour ceux que le sujet intéresse, Gizmo vous conseille la lecture de
Little Big Horn, autopsie d'une bataille légendaire de David Cornut (Ed. Anovi, 2008).
Si vous visitez les lieux, ne vous contentez pas de rester sur le Custer Battlefield, mais reprenez votre voiture pour longer la Little Big Horn River et le campement indien afin d'aller jusqu'au Reno-Benteen Battlefield, sans cela la visite me semble un peu vaine, vous n'auriez qu'une seule partie de l'histoire.
La route du parc traverse un ranch, nous croisons des chevaux
La Big Horn River séparait le campement indien et les troupes de Custer derrière les collines
Pour la visite compter deux heures minimum, 4 heures si vous participez à une conférence (séances organisées par les rangers) et si vous visitez le petit musée-librairie du Visitor Center.
Un peu avant midi, nous reprenons la route 90 jusqu'à Crow Agency (à 5 minutes) pour ensuite bifurquer en direction de St Xavier, en plein territoire Crow. De là, nous devons rejoindre Pryor et le
Chief Plenty Coups State Park, soit 2 heures de route et de paysages très secs.
Sur les routes du Montana

Ce détour n'est pas des moindre (en terme de temps) car après cette visite, en quittant Pryor, la route n'est plus goudronné et nous devrons prendre une piste gravillonnée pendant un peu plus d'une heure, un peu au milieu de nulle part. Aujourd'hui je me dis que ce détour fut bien long pour une visite au final bien inutile (mais on s'en souviendra !

). Le Chief Plenty Coups State Park n'est pas très intéressant et le minuscule musée est plutôt destiné aux enfants dont les parents voudraient les sensibiliser à la cause indienne. Le petit parcours en extérieur n'a rien de bien folichon (on nous explique vaguement comment vivait le Chef Plenty Coups, en gros les indiens vivaient dans des tentes, tu parles d'une révélation !

) et semble presque laissé à l'abandon. Les panneaux sont effacés et le sentier pavé ne ressemble plus à grand chose.
Lors de cette très courte balade dans le jardin, nous sommes suivis par une chienne, sortie de nulle part, plutôt âgée.

Elle est étonnante car elle s'arrête quand nous et repart quand nous, tout en gardant ses distances. Dès que nous nous retournons, elle est là. Au bout d'un moment, nous nous assoyons dans l'herbe à l'ombre pour nous poser (il fait une chaleur épouvantable) et tentons une approche. Elle se montre amicale mais suspicieuse. On se plaira à croire que cette chienne n'est autre que la réincarnation de l'âme du grand Chef indien resté sur les lieux.
Our best friend in Montana ! 
Les extérieurs ne nous apportant rien (et la maison du Chef étant fermée à double tour), nous rentrons finalement dans le musée qui, en terme de collections, est très pauvre et ne vaut pas les musées vus auparavant. On fait quand même le tour question de se dire qu'on n'est pas venus jusqu'ici pour rien. La personne présente à l'accueil vient alors vers nous pour faire les présentations, puis elle sort une grosse clef de sa poche (comme une vieille clef de cave) et nous dit que si l'on veut, elle peut nous prêter la clef pour rentrer dans la maison du Chef Plenty Coups. Et là je me dis, ah, finalement cette visite ne va peut-être pas se révéler complètement inutile. Gizmo me laisse sous entendre que le parc ne casse pas trois pattes à un canard et qu'on ferait peut-être mieux d'y aller. J'insiste un peu, mince faut quand même qu'on voit un truc digne d'intérêt, car mise à part l'énigmatique chienne

, notre visite se révèle franchement décevante. Gizmo se laisse convaincre. Mais pourquoi est-ce que je n'ai pas voulu écouter Gizmo ?!

Et cette chienne, au final, est-ce qu'elle n'essayait pas de nous dire un truc ?!

Nous voilà donc repartis vers la fameuse maison.
Deux portes, une seule clef...
Laquelle de ces deux portes est la bonne ? Gizmo tente de rentrer la clef dans la première serrure, c'est impossible. Bien, c'est donc l'autre porte… bingo, la clef rentre parfaitement dans la serrure, mais… impossible de la tourner. On force une fois… deux fois… la seconde fois est de trop, on tord la clef et on parvient à l'enlever bien difficilement de la serrure. A ce moment précis la seule chose qui est venu à mon esprit c'est
"mais qu'est-ce qu'on est venu faire dans cette galère ?!" dans un langage toutefois un peu plus fleuri. :P Une seconde plus tard, gros moment de panique. On est absolument tout seul, au milieu du désert du Montana, chez les Crow, et on vient tout simplement de casser une clef ouvrant la porte d'un musée.

Ca c'est de l'inattendu et de l'inédit, c'est certain. Bon, quand faut y aller, faut y aller. Je pousse la porte de l'accueil, courageuse mais pas téméraire, je demande à Gizmo de rester avec moi, je ne veux pas y aller toute seule ! Je m'approche de la dame et elle, étonnée :
-
"Mais vous avez déjà fini de visiter la maison ?!"
-
"Euh… et bien… euh… en fait… euh… non… on n'a pas réussi à y rentrer et euh… on n'a un peu trop forcé et… euh… bin voilà… euh… on a cassé la clef."
J'ai bien cru à ce moment là j'allais m'évanouir. Je me suis noyée dans des excuses, complètement paniquée.
Elle ajoute :
-
"Mais vous avez bien fait le tour de la maison jusqu'à la porte de derrière là où il y a l'accès pour les personnes handicapées ?"
Je chavire là :
-
"Non." (Ah ?! Il fallait donc passer par derrière et prendre l'accès handicapés… en même temps je pouvais de deviner… hein hein…

)
Et la dame tout sourire :
-
"Ah, et bien voilà, c'était la porte de derrière qu'il fallait prendre. Bon… je suis embêtée car je n'ai pas de double de cette clef et vous ne pourrez pas voir la maison."
-
"Embêtée ? Vous ?! Non, non, c'est nous qui sommes embêtés ! C'est même une catastrophe, on est vraiment désolés, mais ne vous inquiétez pas, on va payer pour cette clef, dites-nous combien on vous doit ?"
-
"Ne vous inquiétez pas, rien du tout."
Et là elle nous explique qu'elle va avoir la visite de je ne sais qui dans l'après-midi et qu'elle va lui demander de lui refaire la clef et que ça ne coûtera rien et qu'elle pourra la récupérer dans les deux jours, ce n'est pas un problème. Là je panique complètement, je veux me cacher, m'enfuir, m'enfouir… je me dis à moi même
"bon sang, ça veut dire qu'ils vont passer deux jours sans pouvoir faire visiter la maison… non… mais qu'est-ce qu'on a fait?!".
On se répand une nouvelle fois dans un océan d'excuses, d'aussi loin que je me souvienne je ne me rappelle pas avoir déjà vécu d'instant plus honteux de toute ma vie. Et toujours aussi calme, souriante et amicale, cette charmante dame nous dit qu'elle est vraiment déçue que du coup on ne puisse pas voir la maison mais qu'elle voudrait bien qu'on laisse quand même un mot dans le livre d'or.
Nouvelle preuve, s'il en fallait encore une, que les américains sont vraiment très zen, cool et très sympas. Mais du coup, je me sens encore plus mal et encore plus déstabilisée. On laisse donc un mot dans le livre d'or et on glisse un gros billet dans l'urne (aujourd'hui je me dis, qu'aurions-nous pu faire d'autre de toutes façons ?)
Sitôt la porte fermée, on se presse très rapidement jusqu'à la voiture, trop contents de quitter les lieux,

un peu bouleversés tout de même pas cette mésaventure dont on se serait bien passés. On rit jaune (encore aujourd'hui

). Je ne ferai même pas une seule photo jusqu'à Cody…
à suivre...