Jour 11: Jeudi 17 octobre.
Debout tôt. Très tôt: 5h25!
Car aujourd'hui, nous allons à Canyonlands prendre en photo Mesa Arch. Et pour cela, il faut être présent au lever du soleil.
Nous arrivons sur place vers 6h45: chemin de nuit plus préparation dans l'hôtel alors que tout le monde dort. J'ai d'ailleurs fait un potin d'enfer en allant chercher de la glace à la machine. Les autres dormeurs ont du a-do-rer.
On croyait être 4 ou 5 courageux: belle erreur. Il y avait genre 20 photographes sur place.
Il y en aurait même eu plus si une dame n'était pas tombée dans le noir sur le chemin menant à Mesa Arch.
La pauvre avait le visage tout tuméfié. Nous lui proposons immédiatement de lui apporter de la glace provenant de la glacière située dans notre voiture.
Alors qu’elle souffre visiblement beaucoup, elle refuse gentiment et nous explique qu’elle ne veut pas nous mettre en retard et que nous risquons de ne plus avoir de place intéressante si nous traînons trop. Nous finissons par nous remettre en chemin vers le point de vue, un peu tracassés par la perspective de ne pas trouver de créneau où nous installer.
Arrivés sur place, nous constatons que la pauvre dame avait raison : c’est rempli de monde à un point tel que l’espace d’un instant, on croit devoir rebrousser chemin devant l’impossibilité de prendre des photos dignes de ce nom. L'arche est complètement cachée par les photographes et leurs trépieds. Heureusement, vu mon matériel (un gorilla pod au lieu d’un véritable pied), je ne prends que très peu de place. Je parviens donc à me glisser au ras du sol, sous le trépied d'un autre photographe, sans gêner qui que ce soit.
Miracle : le spot est idéal (peut-être même meilleur que celui choisi par des gens arrivés avant nous) et me permet de prendre de beaux clichés (le tout dans un froid glacial dont, selon Pierre, je semble à peine me rendre compte).
Une fois ces photos prises (il faut reconnaître, l'effet du soleil levant est saisissant sur l'arche et cela valait vraiment le coup), nous repartons vers le visitor center pour obtenir quelques informations.
En effet, nous désirons avoir l'avis des rangers sur la capacité de Kimberley à franchir les pistes du coin. Nous sommes accueillis par une toute jeune ranger, extrêmement enthousiaste par rapport à son travail et pulvérisant le record du nombre de fois où le mot "awesome" peut raisonnablement être placé dans une conversation.
Son collègue plus expérimenté nous rassurera quelque peu: selon lui, ce type de voiture arrive fréquemment à franchir la piste qui nous intéresse. En gros, ça passe ou ça casse et si ça casse, c'est 1000 dollars qu'il faudra débourser pour sortir la voiture de là. Nous voilà prévenus. Néanmoins, il a l'air confiant.
La journée se passe en balades plus reposantes que celles que nous avons effectuées à Arches, à Zion ou à Bryce. Mais cela ne veut pas dire qu’elles sont moins intéressantes.
Le panorama est prodigieux et nous fait mieux comprendre tout le sens de l’appellation « Island in the Sky » : on a l’impression d’être au bord du monde, à contempler une contrée à la fois magnifique et inaccessible.
Nous sommes également souvent tous seuls sur les sentiers (nous n'avons d'ailleurs croisé personne sur le chemin menant au White Rim Overlook), ce qui rajoute à cette sensation d’évoluer dans un univers irréel.
Malheureusement nous aurons le soleil de face toute la matinée. Je n'avais pas du tout pensé à ça en préparant la visite.
Comme nous sommes seuls, on se fait plaisir!
Bon, fini les plaisanteries!
A noter cependant que je montre des signes de fatigue : le réveil précoce est en train de se faire payer. Ainsi, après avoir fait une micro sieste dans la voiture, Pierre doit me trainer pour monter sur le sentier menant à l’Upheaval Dome. Au final, je ne me rappelle même plus de ce que j’y ai vu, ce qui fait beaucoup rire Pierre.
Enfin, nous nous décidons à quitter le parc, mais en empruntant le Shafer Trail suivie de la Potash Road.
Avant même de nous engager sur ces pistes, nous nous offrons un arrêt sur une zone nous offrant un point de vue panoramique sur la descente vertigineuse que représente le Shafer Trail. On ne va pas se mentir : c’est impressionnant. La dénivelée est visiblement assez aigüe et on ne peut qu’admirer les cyclistes la remontant à un rythme de démence pure.
Je me fais plaisir cette fois-ci : c’est moi qui prends le volant pour descendre une bonne partie du Shafer Trail !
Je m’amuse comme une petite folle à négocier les tournants en épingle à cheveux (à une allure raisonnable quand même). Pierre s’occupe de l’aspect « photos » des choses.
Nous croisons encore quelques courageux cyclistes que nous acclamons au passage. Kimberley se comporte bien : rien à dire à son niveau.
Le soleil commence lentement à se dire qu’il est temps de se coucher lorsque nous terminons le Shafer Trail.
Nous nous engageons cependant sur la Potash Road : au programme, plus de 20 miles de pistes plutôt rudes.
Pierre s’est remis au volant (à mon avis, il ne me faisait pas confiance...). Mais on est beaucoup moins détendu que sur le Shafer Trail : la route est délicate. Ça monte, ça descend, c’est très accidenté et les nids-de-poule sont vicieux.
Kimberley montre des signes de fatigue dans une montée assez sèche sur de la pierre et Pierre est forcé de faire marche arrière pour mieux repartir.
Les pneus souffrent (on peut littéralement les sentir) et ce qui doit arriver arrive : 100 mètres plus loin, alors que la piste est toute lisse, on entend un bruit étrange et la tenue de route devient très hasardeuse. Pas de doute : on a crevé. On essaie de rouler beaucoup plus lentement sur le pneu crevé mais on se rend instantanément compte (après quelques centaines de mètres) que cela n’est pas tenable. Le pneu est complètement à plat et nous risquons des dégâts encore bien plus importants si nous persistons sans changer de pneu.
Pierre trouve une zone lui permettant de se mettre sur le côté et de changer le pneu sans gêner la circulation (car oui, il y a d’autres voitures qui tentent le même chemin que nous). Pendant qu'il s’affaire, un couple d’Américains d’un certain âge, garés à proximité, s’approche de nous et vient nous demander si nous avons besoin d’aide. Pierre assure qu’il gère la situation (ce qui est vrai), et prend même le temps de jouer quelques secondes avec le chien de ce sympathique couple avant de se remettre au travail. L’ambiance est détendue mais je suis stressée : je me demande comment va se passer le reste de la balade sur la piste.
Je demande alors au couple si la route est difficile sur les miles qui nous restent. La réponse est sans appel: oui. C’est très rude. Quelque part, on est reconnaissant au Mr de ne pas avoir pris de gants avec nous et de ne pas nous avoir menti. Mais cela n’est pas fait pour arranger mon stress ! Finalement, le couple repart après nous avoir dit au revoir.
Pierre termine de changer le pneu en un temps record (une vingtaine de minutes ! je n’y croyais pas). Nous nous remettons donc en route. Prudemment. TRES prudemment. Car la route est comme nous l’a dit notre interlocuteur : difficile et délicate.
Le pneu ne m’inspire pas confiance : un pneu galette, absolument pas conçu pour être utilisé sur une telle piste. Pierre avance lentement (mais il a parfaitement raison d’agir ainsi). Je suis tellement angoissée que je ne dis rien et ne prends aucune photo. Pendant ce temps, le soleil se couche inexorablement.
Les miles défilent et toujours pas d’asphalte. Nous nous faisons régulièrement dépasser par des 4X4 bien mieux adaptés que nous à cette route. Kimberley montre ses limites et Pierre doit déployer des trésors de conduite pour négocier au mieux certains nids-de-poule et autres tronçons fort accidentés.
ENFIN, nous touchons à nouveau le bitume. C’est un grand soulagement : si jamais nous devons avoir encore un souci avant d’arriver à Moab, au moins, nous serons couverts par l’assurance.
Finalement, on arrive à Moab sans plus de problème.
Pas de bol: le spécialiste en pneus de Moab est fermé. Il faudra attendre demain pour régler ce soucis. On passe quand même au car-wash, histoire d'avoir l'air un minimum crédibles quand il s'agira d'expliquer qu'on a crevé sur la route et non sur une piste.
En attendant, un petit souper à Moab's Brewery et puis direction la chambre.
Grasse matinée demain! (c'est à dire 7h du mat, oui j'aime rire)