Il est un endroit aux USA où vous ne verrez pas beaucoup d’américains, le Bagdad Cafe ! Et pour cause, les lieux sont fréquentés à près de 80% par des français et des allemands (ainsi que quelques japonais).
En prenant un verre dans ce café perdu au milieu du désert, les amateurs de la Route 66 restent, sans mauvais jeux de mots, un peu sur leur faim… mais c’est parce qu’avant d’être une attraction de la Mother-Road, le Bagdad Cafe est surtout un site de pèlerinage cinématographique, le lieu de tournage d’un film devenu culte en France et en Allemagne mais totalement ignoré aux USA…
C’est ici qu’entre mars et avril 1987, le cinéaste allemand Percy Adlon a tourné son film Bagdad Café (Out of Rosenheinm), contant l’amitié improbable entre deux femmes, une touriste allemande ayant tout perdu à l’exception de son âme généreuse et une propriétaire de café afro-américaine désabusée par les aspérités de la vie.
Aujourd’hui, le café est à l’image de ce qu’il est dans le film, un endroit un peu kitch sorti de nulle part et habité de gens adorables accueillant des touristes venus de l’autre côté de l’Atlantique…
Où se trouve le Bagdad Cafe ?
Le Bagdad Cafe est situé à Newberry Springs en Californie, dans le désert Mojave, sur l’historique Route 66.
- Adresse : 46548 National Trails Hwy, Newberry Springs, CA 92365
Temps de visite
Le temps d’une pause café/photo… et plus si affinités avec les lieux et ses habitants !
L’expérience du Bagdad Cafe
Selon l’heure à laquelle vous vous arrêterez au Bagdad Cafe, vous pourrez croiser des cars complets de tour opérateurs. Tâchez donc d’éviter le milieu de journée et préférez le matin tôt ou la seconde partie de l’après-midi. Si un car est là, la seule chose à faire est d’attendre qu’il reparte, vous pourrez alors profiter pleinement des lieux !
Une fois entré à l’intérieur, vous y rencontrerez la patronne, Pruett, très accueillante et particulièrement chaleureuse, ainsi que ses acolytes dont on ne sait plus vraiment s’ils sont ses employés, ses amis ou ses clients… A l’instar du film, les habitués et les locaux se croisent ici quotidiennement, formant une famille recomposée et accueillant les touristes de passage non sans beaucoup d’émotion.
N’entrez pas au Bagdad Cafe pour y manger un repas mémorable (vous y trouverez quelques classiques assez simples à prix très abordables : burgers, frites, sandwichs, sundaes…), prévoyez d’y boire un verre et de discuter avec cette petite tribu dont la destinée pourrait faire l’objet d’un film. Pruett a d’ailleurs écrit un scénario The Real Bagdad Cafe, qu’elle vend sur place. On peut s’étonner de voir à quel point la réalité a dépassé la fiction, tant la vie de Pruett est en elle-même un sacré parcours, digne d’un film.
Pruett vous racontera sa vie, vous décrochera du mur du comptoir la célèbre bouteille thermos jaune du film, ainsi qu’un chouette panneau Route 66 pour immortaliser la rencontre.
Le film est bercé par la voix envoûtante de Jevetta Steele interprétant une composition de Bob Telson nommée aux Oscars en 1989, “Calling You”. Si vous êtes vraiment fan de la chanson, un jukebox est là pour vous !
Pruett est fière, à raison, de ce qu’elle a réalisé et vous montrera ses livres d’or signés par ses clients. Ils sont empilés dans un coin, coincés entre des packs de Budweiser et des photos historiques, une sorte de tour de Pise instable qui ne tient vraisemblablement que par la force des mots des clients heureux d’être passés par ici.
L’intérieur du Bagdad Cafe raconte l’histoire de touristes tombés amoureux d’un film dans les années 80 et qui un jour ont fait un voyage…
Du sol au plafond, la salle est pleine de drapeaux, photos, cartes postales, stickers, petits objets, souvenirs, vêtements, billets de banque… des mots doux, des signatures… des décennies de visiteurs !
A l’extérieur se trouvent les vestiges de la citerne d’eau, désormais démontée, ayant servi dans le film, et également la caravane Airstream du personnage de Rudi Cox (interprété par l’acteur Jack Palance) qui est restée ici, derrière le café, depuis le tournage !
Malheureusement, le motel voisin a été rasé et n’est plus qu’un lointain souvenir. Seule demeure la fantomatique enseigne au néon vintage. Elle nous rappelle qu’ici même, il y a près de 35 ans, un grand film fut tourné au cœur du désert Mojave.
Ne quittez pas les lieux sans avoir pris soin de laisser un message dans le livre d’or et un souvenir de votre passage sur les murs déjà bien remplis. Avec un peu de chance, y apercevrez-vous peut-être des stickers Sunset Bld… cherchez bien !
Pratique
- Horaires : ouvert tous les jours de 7h00 à 19h00
- Parking : gratuit
- Wifi : non
Hébergements
Hôtels
Vous pourrez loger à Barstow où vous trouverez de nombreux motels à prix abordables.
Booking.comCamping
Toujours à Barstow, quelques campings (dont un KOA) et RV parks.
Un camping également à Calico Ghost Town.
Histoire du Bagdad Cafe
Avant le tournage du film Bagdad Café, l’établissement s’appelait Sidewinder Cafe, construit et ouvert dans les années 1940. Le vrai Bagdad Cafe, dont s’inspire le film, se trouvait à Bagdad et avait fermé ses portes quelques années plus tôt.
C’est dans les années 1990 que Pruett, actuelle propriétaire du café, quitte Los Angeles pour venir s’installer dans le désert Mojave, à Newberry Springs avec son époux, tous deux souhaitent ouvrir… une ferme à autruches ! Mais le hasard fait qu’après avoir mangé le meilleur burger de sa vie au Sidewinder Cafe, la mari de Pruett se montre très enthousiaste à l’idée d’acheter l’établissement, Pruett un peu moins, mais elle se laisse convaincre par son époux. Une fois installés, Pruett pense alors qu’il serait judicieux de renommer leur restaurant Bagdad Cafe pour profiter un peu du succès du film.
Après le décès de son mari, puis de son fils, Pruett décide de rester ici, au cœur du désert Mojave, auprès de ses amis. Difficile de ne pas songer alors au personnage de Brenda (sublime CCH Pounder) qui rejoint le parcours de Pruett dans ce lieu isolé à la lumière unique…
Bagdad Cafe : le film
A desert road, from Vegas to nowhere… Some place better than where you’re been. A coffee machine that need some fixing… And a little caffffeeee just around the bend… Ahhhhhhh I’m calling you…
Bagdad Café est un film hors du temps, extrêmement singulier, voire fantasmagorique et qui échappe à toute tentative de classement de genres. On oscille entre la comédie burlesque, le drame social, la fantaisie, la fable féministe, le parcours initiatique… On y suit le périple intimiste d’âmes blessées, perdues au sens propre et égarées par les affres de l’existence. Des marginaux de tout bord et que rien ne prédestinait à se rencontrer et qui finissent par former une chorale disparate, une famille, celle qu’ils ont choisie.
Sur la forme, Percy Adlon se permet toutes les fantaisies (plans penchés…), usant et abusant de filtres portant avec eux une lumière surnaturelle dans un lieu miteux et abandonné. Le résultat est d’une poésie magique et foudroyante.
On peut légitimement penser que l’étrange phénomène que Jasmine (incroyable Marianne Sägebrecht) appelle sa “vision” au début du film, sorte de mirage peint plus tard par Rudy (Jack Palance), résume à lui seul l’esprit du film. Ce phénomène optique atmosphérique existe réellement et s’appelle une parhélie (sundog en anglais). Il consiste en l’apparition de deux répliques de l’image du soleil et est due à la réfraction lumineuse sur les cristaux de glace contenus dans les nuages de haute altitude… on en voit fréquemment par chez nous, plus facilement quand le soleil est assez bas sur l’horizon.
Dans un documentaire réalisé par Adlon à l’occasion du 30ème anniversaire du film “The Trip to Bagdad” (le cinéaste était retourné sur place avec ses petites filles afin de leur raconter la genèse et la construction du film), on apprend que Adlon et son équipe avaient observé ce phénomène lors du tournage et l’avait même photographié. Il explique qu’il s’était à l’époque renseigné auprès des locaux, cette “parhélie” était en fait dû à une centrale solaire située dans le désert entre Las Vegas et Barstow.
A quelques miles de là
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- Photos : Frédéric Payrot, Joana, Isabel4601, Isa